• angelo tyran de padoue

    angelo tyran de padoue, christophe honoré

    opéra

    les formes littéraires vieillissent très vite comme les gens, au point d’ailleurs de sembler presque nouvelles dans la lecture distante, mais Montaigne n’existera plus qu’en traduction, ainsi d’Hugo et de la plupart des classiques, Whitman tout autant, qui lit la Princesse de Clèves dans le fond, hors d’effet d’annonce d’un tyran de Padoue, l’actuel est vide d’une apparence, le côté journaliste qui survole pour mieux noyer et pousser ailleurs ce qui jamais ne se localise, je me souviens de ces petits théâtres adolescents qui racontaient des histoires impossibles de grands sentiments, de sacrifices, d’émotion très, trop forte, à la limite , toujours au delà, du comique, cet intérêt pour des affaires classiques, femmes coupables, mère et pute, et homme pantin, tout puissant et dérisoire, intemporel des fictions soit disant perdues, perdues dans une modernité ennuyeuse, j’aimais ces histoires un peu désuètes mais fortes, et je me suis perdue, en partie à cause de Karl et ses amis, dans des jeux d’écriture qui finisse par faire le fond de ce que je raconte, j’y perds la violence du cauchemar premier, échapper à la manie du camp , de ce qui enferme l’être, revenir à ce réel de rêver sa vie au point de voir l’autre en sa présence comme un pur éveil nocturne, nullement une joie, la cohérence ainsi de la monade, absolument, j’ai tellement eu envie de mettre en jeu non pas l’hystérie entre femmes mais le froid réel entre femmes comme ces dialogues du Nord où je n’ai jamais voulu oser aller, cette pente vers un côté immédiat, sensible, neuf et joyeux, loin de l’eau dormante, j’aurais du quitter Karl pour aller vers cela, ce lointain actuel, franchir les frontières, il y a des scènes partout qui converge vers mon texte, mais je ne veux pas, je refuse donc Picasso, oui, c’est certain, cet appétit , je me le refuse pour cette histoire stupide du style, cet ennui en soi, pourquoi n’ai je pas poussé vers Emma qui monte de la brume, micro-scènes immobiles, cette intensité du minuscule, le trivial poétique, détruire la beauté de ma langue, 

     

     

    la décision de me donner la mort me libère de cette impression fausse d’avancer vers rien,, me libère de la toute puissance des chants ordinaires de mort, me restitue à l’amour possible, ce à quoi on ne doit mondainement concéder sauf à le citer à distance. Je deviens femme dans ma décision, cet éloignement infini de mon maître ordinaire, et donc de toute possibilité d’avoir le moindre contrôle sur moi, je n’appartiens plus au royaume de la peur, je suis indifférente au pouvoir de Karl puisque j’existe et en tant que telle je pense, horreur du pouvoir qui faute d’ennemi déclaré tremble devant le potentiel irréductible d’une pensée qui pense simplement le pouvoir, l’angoisse m’a quitté, la peur a changé de camp, désormais je revis l’espace du marivaudage comme une réalité précieuse qui ne peut être ramené à une interprétation totale , je ne peux plus différer l’espace du mourir, mais c’est un mourir joyeux, le comique se retourne vers le maître qui voudrait être aimé pour lui même, je quitte légère le territoire de l’obscène dont mon écriture regorgeait, je m’enfonce avec le texte nouveau qui m’accompagne sans regret, le pur effacement de Benjamin, libre et non pas désespéré

     

     

    Le premier bellâtre venu pourrait faire l’affaire, aime moi beau passant imbu de ton désir qui te porte malgré toi, je me soumets à ton désir, totalement, jusqu’à t’obliger à démasquer la part semble qui le compose, maudite psychologue aurait on dit chez le russe 

     

    ne jamais céder sur le côté frontal comme fin mais l’exprimer entièrement, , je demeure jusqu’au bout l’objet du fantasme de Karl, mais je ne lui appartiens plus, il croit m’enfermer dans l’atelier d’écriture, je cesse d’écrire pour mourir, le gentil club est un jeu de matons, et sans doute chacun ou chacune espère me coincer dans quelque coin, aucun ne peut me suivre, ils n’auront plus qu’à se nourrir des restes demeurés sur la rive

     

     

     

    je songe alors aux femmes, parfois qui échappent à l’ordre, capables non pas de cris mais de murmures, le harem sans doute, hors effraction pour soutenir la possibilité cette fois d’une voix masculine qui pourrait se défaire de sa place sans cesse, pantomime, comique, drame et ridicule, selon une portance basse comme un orage, j’ai dû entendre cette voix une fois, c’était celle d’une femme, dans le Sud ludique d’un matin d’Italie


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